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Photo du rédacteurL'abeille lunaire

L'imaginaire politique


Voilà deux notions que je n'aurais jamais imaginé ensemble... Comme quoi, on peut toujours être surpris.


Imaginer c'est se projeter, c'est créer, initialement de manière secrète, un monde, des personnages, des histoires. Imaginer c'est s'apaiser, c'est s'autoriser une pause, c'est s'envoler. C'est le temple de l'enfance et des créateurs. Ce sont nos pires cauchemars et nos désirs les plus inavouables. Le monde de tous les possibles, mais le monde où il est impossible de nous atteindre. C'est la bulle impénétrable dont nous seuls avons la clé, la bulle protectrice, la bulle magnifique, notre bulle... douce et mélodieuse. Le résultat poétique du conscient et de l'inconscient, de l'esprit stimulé, des sens aiguisés.


La politique, elle, a de nombreux visages. Un masque protecteur, un masque de dictateur. Un voile d'égalité, un voile d'autorité. Souvent, on dissocie la politique de la liberté car elle nous pose des limites. Souvent, on crache sur la politique car on l'imagine hypocrite.

Reprenons depuis le début : la politique, au départ, c'est l'organisation d'une Cité, c'est la concorde du peuple, sa protection, sa législation. La politique c'est ce qui vise un but bien précis : un bien commun ; certes un peu idéaliste, mais admirable. Moralement, la politique est le chien de garde de l'éthique, des valeurs, des droits de l'Homme, de la liberté et de la paix.

Après... joue-t-elle toujours bien son rôle ? Ça c'est un autre article.


On imagine très peu des politiques lire de la poésie, imaginer un monde idéal, de friandises et de jeux vidéos, se promener dans la nature, l'esprit virevoltant, retomber en enfance à la fête foraine ou entretenir une conversation barrée avec leur meilleur ami. Car la politique, la politique ingrate et compliquée à laquelle nous pensons immédiatement, n'est en rien compatible avec la beauté et la liberté du monde imaginaire. Est-ce que la politique a sa place dans Neverland ? C'est absurde ! Bon. Alors qu'est-ce que l'imaginaire politique ?

C'est simplement savoir quelle est notre place dans la société.

Avoir l'imagination de nous projeter et de nous incruster dans cette société déséquilibrée régie par la politique. Avoir la force d'imaginer quel rôle nous jouons ou nous pourrions jouer dans la société. Car pourquoi la politique nous semble-t-elle ingrate, d'emblée ? A cause des idées sourdes, des partis extrêmistes, de la valorisation des « grands » et surtout de la sauvegardes d'inégalités sociales. Et de ce dernier point naît ce que nous appelons « la société », cette société qui a bien des égards est difficile à supporter, est sexiste, haineuse, traditionnaliste, égoïste, destructrice et étouffante. Alors oui, s'imaginer en faire partie demande une force d'esprit considérable et une imagination débordante. Parce qu'on connaîtra tous ce sentiment de dégoût, ce déni qui veut nous pousser à nous en dissocier... mais il faut accepter que, quoi que nous fassions, la société c'est nous. Sans nous il n'y a pas de société, sans nous il n'y a pas de politique, sans nous il n'y a pas de relations, de commerce, de guerres mais aussi de paix. L'imaginaire politique c'est trouver sa place, au sein de cette société, pour ainsi la pousser à évoluer du mieux que nous le pouvons. C'est faire ce pour quoi nous sommes faits, réaliser nos excellences et nos vertus, en en faisant profiter ce monde un petit peu bancal.

Maintenant c'est possible de trouver sa place et ses idées. La Modernité nous a permis une chose qu'on ne peut nier: l'accès à l'information. Nous sommes au courant de ce qu'il se passe sur Terre, au courant des idées politiques qui s'affrontent et des enjeux mis en tension. Alors se faire un avis, en piochant dans toutes ces sources ce qui nous semble le plus judicieux et le plus juste, n'a jamais été aussi facile. Il ne s'agit pas de prendre parti, il s'agit surtout de comprendre, d'adhérer, de contrer ou de critiquer avec finesse. Quelque soit le parti en face, quelque soit la personne en face. On peut être en désaccord avec un ami, comme on peut admettre l'argument d'un ennemi. Toute la question est de savoir comment critiquer le problème, pour le comprendre, et donc comment le régler ? Comment faire comprendre, comment faire entendre, comment tomber d'accord.

Si nous ne pouvons pas agir, nous pouvons dire, en tant que société, en tant qu'industrie, en tant que consommateurs, en tant que nation, ce que nous désirons. Dans quoi nous désirons vivre et pourquoi.


En faisant notre bonheur on réalise celui des autres. C'est vrai que cela peut sembler idéaliste et propre au monde des bisounours uniquement, mais je trouve que l'idée se défend.

Celui qui aime pétrir son pain, qu'il le fasse avec plaisir chaque matin et il rendra tous ceux qui aiment manger du bon pain heureux. Il sera un exemple du travailleur passionné et non pas aliéné. Il jouera son rôle d'indépendant, d'artisan, nous transmettra des messages humbles et des valeurs honorables. Il nous régalera et nourrira la société d'idées modestes, humaines et généreuses comme la qualité des produits, donc la qualité et les conditions d'agriculture, donc le BIO. De son plaisir naît celui des autres, et son rôle est incontestable et irremplaçable.

Celui qui aime écrire, qu'il écrive. Qu'il en jouisse chaque jour. Et peut-être finira-t-il par transmettre des messages politiques ou humanistes via la presse, des scénarios de films ou des romans. Ceux qui aiment lire s'enrichiront, s'instruiront avec plaisir, et eux-mêmes se serviront de ce qu'ils auront acquit dans ces œuvres pour faire bouger la société à leur niveau. L'art touche tout le monde, à sa façon.

Celui qui aime dialoguer, communiquer, débattre, qu'il ne cesse jamais de le faire. Qu'il parle, qu'il enquête, qu'il questionne pour étoffer ses argumentations. Et avec du temps et des performances il gravira les échelons, il fera entendre sa voix à la télévision, et si ses idées sont justifiées, nobles et humaines, il sera suivit. Et, l'un avec le plaisir de faire ce qu'il sait faire, l'autre avec le plaisir d'être compris, entendu et représenté, tous feront changer cette société qui laisse parfois à désirer. Ou bien créera-t-il son association ou son émission, pour faire passer l'information, l'idée, et ainsi servir de vecteur, de point de relai, de ressort entre le peuple et le monde politique.


La perfection n'existe pas, mais l'Enfer non plus.

L'Enfer sur Terre est ce que nous en faisons. Alors en poussant l'imagination... nous pourrions vivre dans un équilibre, je pense, tout à fait convenable. Simplement, il faut prendre du recul. Car oui, à l'échelle d'un être, un acte semble moindre. Mais si tout le monde triait ses déchets ? Et si tout le monde donnait son sang ? Et si tout le monde allait voter ? Et si tout le monde se faisait vacciner ? Et si tout le monde faisait le métier qu'il a envie de faire ? Et si tout le monde limitait sa consommation de viande ? Et si tout le monde était honnête sur ses sentiments ? Et si tout le monde assumait de s'occuper de son animal domestique ? Et si tout le monde initiait ses enfants au respect ?

Alors certes, à nous seuls rien ne changera. Mais il ne faut pas seulement voir nos actions comme des efforts incompris des autres, mais comme des précurseurs, des messages, des exemples à suivre. Tout le monde n'a pas le déclic au même moment ou pour les mêmes raisons. On peut comprendre l'impact de nos gestes quotidiens juste en écoutant à la radio les scientifiques et les journalistes nous annoncer les catastrophes que subit la planète. Mais certains, et c'est compréhensible, auront besoin de voir un élevage intensif de leurs propres yeux. D'autres devront attendre de tomber malade. Pour d'autres encore il faudra une pandémie interminable.

Alors soyons patients.

Mais essayons tous, avec comme objectif une harmonie la plus réaliste possible, de nous projeter comme acteur de ce monde, et non pas comme spectateurs. Même si pour cela il faut faire preuve d'un peu d'imagination.


Références :

Certaines bases de la déf de Politique d'Aristote

Inspirations du journaliste Hugo Clément ("l'industrie c'est nous", citation du Podcast InPower de MyBetterself)


Signé : une abeille lunaire


6 Comments


phiso
phiso
Nov 13, 2023

Ce court texte sur l'imagination politique renvoie chez moi à tout un univers de l'utopie politique, que j'ai surtout exploré dans son versant dystopique à vrai dire, à grand coup d'Aldous Huxley, de Georges Orwell, d'Hunger Games, de Divergente et de La Faucheuse. Notre imagination politique à cette tendance à se concentrer sur nos peurs et nos haines, et c'est bien normal. Notre monde manque d'utopie.


Cette image du politicien rêveur est effectivement impossible dans un système qui s'occupe de sa gestion de manière technocratique, élitiste et autoritaire. Mais il le faudrait, non pas dans le sens de donner des vacances à nos chefs mais plutôt d'empêcher que quelqu'un ne soit chef. Soyons tous ceux qui décident et ceux qui…


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AbeilleLunaire
Nov 16, 2023
Replying to

Je comprends totalement et le doute est précieux, enrichissant. Il permet d'explorer.

Je suis d'accord que demander de l'aide est une action, une action nécessaire. Mais le simplement fait de demander de l'aide demande un effort titanesque pour une personne qui désespère, qui déprime, une personne dépressive. Je ne dis pas que la totalité de l'humanité est dépressive (quoi que) seulement que l'environnement dans lequel elle a évolué n'a permis, forcément, le développement d'une confiance, d'une force, d'une assurance nécessaire à la moindre action. C'est très très difficile de sortir de l'inaction d'un désespoir. C'est très difficile de sortir de son lit quand on est dépressif.

C'est ce que je voulais dire. Il y a des personnes, beaucoup, en ce…

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