top of page
Photo du rédacteurL'abeille lunaire

La Confiance


Quand a-t-elle disparue ?

N'a-t-elle jamais existée ? Ou bien s'est-elle faite effacer par la société ?


La confiance est, aujourd'hui, un cadeau inestimable. Car avoir confiance en quelqu'un, c'est l'aimer profondément, sincèrement, c'est le reconnaître, c'est le respecter, le croire, le défendre, c'est s'ouvrir au monde, ou un moyen d'encourager le monde à lui aussi s'ouvrir. Avoir confiance en soi est le commencement de toute relation mais également de toute évolution. Car il faut de la confiance pour aimer, pour dire « oui », pour aider, pour accompagner quelqu'un. C'est difficile, aujourd'hui, d'avoir un ami de confiance sachant qu'à la première opportunité, par vengeance, par jalousie, pour de l'argent ou de la renommée, il nous marcherait dessus. C'est difficile de s'offrir à qui que ce soit car on ne peut pas ne pas se méfier de ce qu'il en fera. De ce qu'il fera de notre corps, de notre image, de nos sentiments, de nos confessions, de nos souvenirs. C'est difficile d'aider quelqu'un. Soit car, sans le savoir, nous manquons de confiance en nous, ce qui limite notre champ d'action, soit car nous ne pouvons jamais être sûrs de la sincérité des maux d'autrui.


Et donc, où est le problème majeur ? Que selon des études 50% des jeunes entre 18 et 30 ans, en France, n'aient pas confiance en eux ? Ou, par exemple, qu'une fausse mendicité, dite « organisée » existe et pousse à la paranoïa et la culpabilité ?


Deux sujets, ma foi, tout à fait intéressant.

Deux sujets que je vais me faire un plaisir de décortiquer.


Comment, dans un premier temps, est-il possible d'expliquer qu'autant de personnes aient si peu confiance en elles ? Peut-être parce qu'en France rien n'est jamais assez bien. Ce caractère insatisfait qui nous suit depuis des générations pousse à toujours vouloir mieux faire, certes, mais également à ne jamais se contenter, se féliciter, voire à ne pas remarquer ce que nous avons déjà. « Peu mieux faire » à côté d'un 12/20. Mais c'est déjà un 12 ! Pourquoi faut-il toujours avoir 20/20 ? Et qu'est-ce que cela signifierait ? Que nous avons bien appris par cœur une liste que nous oublierons le lendemain ? Dans ce cas bravo... Mais à celui qui a 12, pourquoi le culpabiliser de ne pas réussir à retenir ce qui ne le stimule pas plus que ça ? Saluons l'effort, saluons la présence. Notre système de notation est en lui même un profond problème qui incite à la comparaison entre élèves, à la perte de confiance en soi et/ou à l'éternelle insatisfaction. De la même façon dont on note les corps par un nombre de like. Non, un esprit ne vaut pas 12/20, ni sa capacité de mémorisation, ni son investissement. Quelqu'un, un jour, lui a mis un 12, voilà tout. Mais tout esprit, quelque part, vaut ce qu'il vaut. Pas un chiffre, pas des années d'études, pas une culture littéraire, pas forcément. Un humain n'est pas juste des notes, de belles formulations ou de jolis diplômes, c'est avant tout des valeurs, une histoire, une sensibilité, des émotions et des rêves. Et ça, la reconnaissance et l'intérêt pour ces critères, fonde la confiance en soi. Et ça, tout ça, a été bien longtemps oublié.


Ni un 12/20 ni 30 ou 3 000 likes. Notes, comparaison, idéaux... je dis « fantasme ». L'élève parfait n'existe pas, et depuis quand y'a-t-il un corps parfait ? Vous m'étonnez qu'il y ait 50% de doutes, de peur et de complexes si la majorité de nos magazines, de nos émissions et de nos idoles prônent, auprès de la jeunesse, un corps inatteignable, superficiel et retouché. Où avons-nous vu cela ? Où ? Pourquoi ? Un corps, n'est-ce pas simplement un support, un véhicule, un biais par lequel vivre, découvrir, voyager et s'amuser ? Initialement... qu'est-ce que c'est ? Nous ne sommes pas nés, me semble-t-il, pour être tel que nous décrivent des inconnus. Nous ne sommes pas nés pour correspondre aux attentes des autres. Nous ne sommes pas nés pour « ressembler à...». Nous sommes nés, quelles que soient les conditions de notre naissance, pour être. Être. Nous-mêmes. Et de cela devrait naître des rêves, des souvenirs, une vie sans regrets. Alors là... Que sommes-nous en train de construire?

La société élitiste se transforme en société superficielle, mais ces critères irréels sont injustifiés. Pourtant ils nous obsèdent. Ils nous traumatisent. Ils nous façonnent et détruisent toute confiance... donc tout espoir. Tout espoir de s'épanouir, de se découvrir, de tout découvrir, d'apprécier la simplicité. A vouloir toujours plus, à vouloir toujours mieux faire, on en oublie que ce avec quoi nous avons débuté la partie était en réalité le trésor à trouver. 50% de la jeunesse française n'a pas confiance en elle, ne se connaît, ne s'aime pas, est de moins en moins curieuse, cherche le réconfort dans des idéaux qui l'éloignent encore plus d'elle-même... De la non-confiance en soi, on passe à la haine contre soi, contre son corps, la haine de ceux qui sont « biens », la haine du monde. Mais ces personnes ont été habituées à avoir toujours 20/20, ou à devoir le viser. Alors il aurait été étrange de ne pas avoir un but « parfait » à atteindre dans tous les autres domaines. Il aurait été étrange de tout avoir dès le départ. Et pourtant, la richesse est en nous. La richesse, la chance, la beauté, c'est de pouvoir marcher, c'est de pouvoir penser, c'est de pouvoir manger, c'est de pouvoir rire. Hommes ou femmes, s'ils aiment véritablement, n'aiment pas un corps, mais un esprit. Et l'esprit, le « bel esprit » ou celui que nous admirons, n'a pas été forgé (ou pas forcément) par des 20/20, mais par sa manière de les recevoir (ou de recevoir n'importe quelle autre note).

Alors oui, nous sommes 50% à ne pas avoir confiance en nous. Mais parce que personne ne nous a dit que nous étions déjà parfaits ! Personne. Personne. Personne, jusqu'à présent, ne prônait le naturel. Personne, jusqu'à présent, ne nous félicitait pour nos pensées, pour nos idées, pour notre art et pour nos rêves. Personne ne nous admirait de prendre du poids car nous profitions de la vie. Personne. Alors comment aurions-nous pu avoir confiance en nous ?

Observons « la vraie vie », levons le nez de l'irréalité : tout est là.


Et en levant les yeux, des personnes me demandent de l'argent. Trempés, maigres, cernés, dans une langue que je ne comprends qu'à moitié, ils m'implorent de les aider. Et en moi tout se pétrifie. Je ne sais plus si je dois les aider, leur acheter à manger, leur donner ce qu'il me reste de monnaie, ou bien m'en aller car ils feignent leur misère ou sont exploités par une organisation. Je ne sais plus. En le disant j'ai l'impression d'être ridicule. Et pourtant, si nous sommes si nombreux à passer notre chemin c'est parce qu'on ne croit plus à une véritable mendicité. Du moins, nous ne savons plus laquelle est la vraie. Il paraît que certaines personnes vivent de la mendicité, et en vivent bien. D'après une étude du Ministère du développement social il existe 196 000 mendiants dont 120 000 « professionnels ». Ces derniers gagneraient plus qu'un smic, et cet argent vient de notre smic à nous ? On dit aussi que des exploitants se servent de personnes démunies pour se faire de l'argent, comme on se servirait d'une adolescente en fugue pour faire la prostituer à notre bénéfice. On parle d'exploitation de la mendicité, c'est interdit par la loi. Certaines personnes utilisent leur enfant, ou un enfant, pour toucher davantage la population. C'est un véritable jeu criminel... Mais le plus révoltant ce n'est pas ces crimes, cette cruauté, mais c'est qu'entre ces deux arnaques monumentales se trouvent de vrais réfugiés, de vrais sans abris, de vraies personnes abandonnées par l'Etat, ignorées par la société, ou simplement mal-informées. Je ne peux pas croire que 100% des mendiants sont des faux. Je ne peux pas.

Il y a, dans toutes les personnes que nous croisons dans les rues, de vraies familles, arrivées récemment, qui n'ont pas le droit à des papiers français, que les communes n'aident pas, qui ne peuvent pas travailler si elles ne connaissent pas notre langue... Qui ne serait pas perdu dans un pays étranger, où tout nous est refusé, complètement ruiné et sans abri ? Et je demande : où est la prise en charge ? Même s'ils sont là illégalement, on ne peut pas décemment les laisser dehors ! Ce n'est plus une question d'économie ou de politique, c'est une question d'humanité. Réfugiés ou pas, d'ailleurs. S'ils n'ont pas choisi d'être là (à la rue), et je serais étonnée d'une telle décision, offrons-leur une solution. Car évidemment, notre confiance est mise à rude épreuve et ce sont eux, ceux qui sont dans un vrai besoin, qui en subissent les conséquences. Leur dernier espoir est de réussir à avoir confiance en l'Etat. La France a l'argent, et elle a déjà la bonne volonté ! Des actions sont déjà mises en place pour prendre en charge les demandeurs d'asile et les réfugiés, disons ceux qui sont légaux. Je sais bien que c'est utopique de penser qu'un pays pourrait aider tout le monde, et je sais qu'aucun d'eux ne peut accueillir et aider tous les malheureux de ce monde. Mais des gens sont déjà là, des personnes sont bien présentes, sur nos trottoirs, elles existent et on ne peut pas les laisser là.

Ceux qui viennent nous demander de l'aide ou qui acceptent celle qu'on leur propose... ce sont eux « les vrais ». Les vrais à secourir. Et que serions-nous si nous fermions notre porte à ceux qui prennent le risque de nous faire confiance, une dernière fois ? Ils devraient avoir raison d'avoir confiance en nous, en l'humanité, ne leur donnons pas tort d'espérer.

Nous, nous ne pouvons que leur offrir un pain au chocolat, une pièce, à la rigueur, mais sur le long terme il leur faudra bien plus. Si je pouvais m'adresser au gouvernement, je les soutiendrais dans leur lutte contre les organismes criminels qui se servent de la mendicité à leurs fins, je leur demanderais de continuer leurs efforts, quoi qu'il en coûte. Et surtout, je leur dirais qu'il faut renforcer la prise en charge concrète des mendiants présents en France. Aller les voir, leur proposer une issue, cela devrait déjà permettre de différencier « les vrais des faux ». Mais ALLER LES VOIR, car parfois ils ne savent pas ou ne connaissent pas les aides qu'ils pourraient avoir, et d'eux-mêmes ils ne feront rien. Et pour ceux qui savent et qui viennent nous chercher, essayons de mieux les accueillir. Mieux accueillir en mairie ou au poste de police ceux qui nous supplient de les aider. Car je ne comprends pas qu'on leur réponde qu'on ne peut rien faire.

Voilà tout... nous donner raison d'avoir confiance en notre gouvernement français. Confiance et fierté. Parce que pour l'instant, sur ce sujet et sur d'autres, je me tâte.


En attendant, personnellement, même si cela peut paraître idiot, j'essaierai, dès que je le peux, de m'arrêter, de parler, d'offrir un goûter à un enfant qui me le demande. Même si ça ne sert à rien, même si c'est un faux mendiant, simplement pour prouver, à lui et au reste du monde, que la confiance, l'espoir et l'humanité existent encore.

De ces rencontres, essayons de leur transmettre cette morale que Socrates image si bien « mieux vaut être juste envers une loi injuste, qu'injuste envers une loi juste ». Alors : allez à l'école, même si l'éducation laisse à désirer, ne volez pas, même si les prix sont révoltants, ne mentez pas, même si profiter du système est plus rentable que de s'y plier, mais simplement battez-vous, manifestez-vous, révoltez le monde, faites bouger les choses par votre humanité qui elle, ne sera jamais illégale. Ne leur donnez pas une raison de vous faire taire.



Signé : une abeille lunaire.





Comments


Post: Blog2 Post
bottom of page