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Photo du rédacteurL'abeille lunaire

L'île rouge




par Robin Campillo

Que voit l'enfant des problèmes des adultes, des problèmes d'un pays, des problèmes d'une époque ?

Que voit l'enfant sur nos visages épuisés et tristes ?

Que voit-il et qu'en fait-il ?


Dans ce film, Thomas est autant une allégorie qu'un témoignage. L'allégorie de l'oppression dissimulée de la France sur Madagascar ; le témoignage de l'enfant innocent, inquiet, curieux, sensible, philosophe, coupable par procuration. Il n'a que 8 ans, il est venu sur l'île avec son père militaire, sa mère et ses deux frères, il lit Fantomette, observe tout le monde, se cache et reste souvent silencieux. Ils sont logés, confortablement, dans la base militaire, loin des révoltes populaires. Pourtant il en perçoit des échos, dans des fragments de conversations, dans des visages préoccupés, quelques rides et quelques faux sourires, dans des cours un peu trop français.... Arrivé pour une durée déterminée dans une société qui n'est pas la sienne.


Ce film, doux, sensible, lent, de la durée de la vie, est d'une beauté qui fait serrer les dents, qui noue le ventre. C'est l'étrange sensualité d'un plan rapproché, concentré sur un baiser, des caresses et des regards, le tout plus autoritaire qu'amoureux ; ce sont les adorables conversations de deux enfants, avides de lectures, à l'imagination vive, aux regards vicieux, teintés de peurs, de lucidité, de doutes, de critiques ; ce sont des mots qui ne sont jamais dits mais que l'on devine ; ce sont des joies amères ; ce sont des corps sombres et maigres, ou clairs et voluptueux ; c'est la lumière d'un pays du sud, mielleuse et étouffante ; c'est la longue promenade d'un enfant, comme un fantôme, observant, récoltant, oppressant, symbole d'une nation trop présente, témoin d'une sensibilité innocente... petit philosophe dans les rares mots qu'il prononce.


Un film à la photographie, aux musiques et aux dialogues merveilleux. Un film sur la beauté d'une île riche et colorée, indépendante mais envahie, surplombée de parachutes blancs. Un film qui dénonce avec subtilité et intelligence la colonisation au XXI ème siècle, celle qu'on a tendance à oublier. Un film qui embrasse et honore l'enfance, elle aussi trop oubliée. Peut-être parce que durant ce temps de l'innocence, des choses et des gens passent, trop, et on préférerait les oublier... ?


L'oubli.


Mais certaines choses ne s'oublient pas.


Pour le meilleur et pour le pire.


Nba : je rédige ce qui m'a plu, moi, à titre personnel. C'est un joli film, que je recommande, mais qui ne plaira peut-être pas à une majorité à cause de son rythme lent, de ses silences et peut-être même du sujet. Cependant, s'il y a des curieux, filez le voir au cinéma. :)

Signé : une abeille lunaire.

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